Jeunesse Éducation
14 juin 2024

Shoah : les collégiens du Nord se souviendront

Cette année, plus de 500 collégiens ont bénéficié du dispositif départemental "Le Nord, Terre de Mémoire vivante" grâce auquel ils ont pu participer à des parcours mémoriels. Le dernier s'est déroulé dans le Nord et en Belgique, pour ne pas oublier l'Histoire et notre histoire.

Après trois déplacements au printemps, en Pologne ou en Alsace, pour 14 classes de collèges nordistes, le dernier parcours mémoriel s’est déroulé à Lille puis au nord de Bruxelles pour 8 autres classes, début juin. Des parcours de mémoire sur les traces de la vie juive et sur des lieux où l’Histoire a résonné tout particulièrement.

"Le Nord, Terre de Mémoire vivante", revêt une importance encore plus grande aujourd’hui qu’hier. Il fallait que ces jeunes appréhendent bien ce qui s’est passé au cours de l’Histoire pour construire leur avenir et surtout pour se prémunir de tout ce qui pourrait arriver.

Marie Cieters, vice-présidente du Département en charge de l'Éducation et des collèges

Des figures de prisonniers, de résistants et de bourreaux

Le parcours dans le Nord et en Belgique a emmené les élèves sur les traces de la famille Baran, une famille juive lilloise, victime de la rafle de Lille, le 11 septembre 1942. Ce choix de parcours a permis de montrer aux jeunes que l’histoire du génocide des juifs a commencé dans nos régions, dans nos villes, que la Shoah a d’abord été mise en œuvre près de chez nous, commente Rémy Sebbah, coordinateur du Mémorial de la Shoah.

Un arrêt est marqué devant la plaque commémorative de la Gare Saint-Sauveur de Lille qui rend hommage aux jeunes lillois assassinés et gazés à Auschwitz et qui rappelle que 11 000 enfants furent déportés de France entre 1942 et 1944, avec la complicité du gouvernement de Vichy.

Ce parcours de mémoire approfondit des connaissances utiles pour leur vie scolaire et pour leur devenir de citoyen, explique Stéphane Henry, inspecteur d’académie. Ces visites de lieux de mémoire permettent d’incarner l’histoire, de lui donner une dimension plus concrète avec des figures de prisonniers, de résistants et de bourreaux, d’ajouter de l’émotion aux connaissances que les jeunes reçoivent en classe.

À ce titre, deux témoignages marquants ont étayé le parcours des collégiens :

Jacqueline Mandelbaum, née 1946, s’est déplacée de Paris pour rencontrer les élèves à la synagogue de Lille. Elle leur raconte l’histoire de ses parents juifs, raflés à Lille en septembre 1942. Sa mère puis son père ont réussi à s’évader des convois, mais aussi à protéger son grand-frère en le confiant à des infirmières. Elle rend hommage à la complicité décisive des cheminots qui a permis à sa famille de survivre.

Jeannette Rapoport, née en 1937 et originaire de Dunkerque a raconté également l'histoire de ses parents durant la Seconde Guerre Mondiale. Son père militaire fût mobilisé en 1940, arrêté à Cambrai et déporté en 1944. Sa mère refusa de porter l’étoile jaune et de la faire porter à ses 3 enfants. Elle parvint à les protéger des bombardements jusqu’à la Libération.

"Se souvenir pour éviter que les évènements ne se reproduisent"

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Dans le Fort de Breendonk, les collégiens découvrent les conditions de vie inhumaines des prisonniers juifs.

Le Fort de Breendonk, en Belgique, fut l’un des points d’orgue du voyage. 3 600 juifs ont péri dans ce camp de travail où les droits de l’homme ont été bafoués. L’ambiance est lourde. Le guide retrace le quotidien inhumain et les conditions de vie atroces des prisonniers.

On ne peut pas rester indifférents à toute cette cruauté, confie Julie, une élève.  Même si c’était une autre époque, on se dit que cela aurait pu être nous.  Les professeurs d’histoire-géographie accompagnent leur classe et saluent le travail de mémoire mené sur ces sites.

Cette visite du Fort de Breendonk est très marquante pour nous tous, raconte Stéphane Gouaux, professeur d’histoire-géographie au collège Bayard de Denain. Être confronté directement aux lieux où les évènements se sont déroulés donne du sens. Les élèves sont très réceptifs.

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L'ancienne Kazern Dossin à Mechelen, servait de lieu de transit avant la déportation pour Auschwitz-Birkenau.

Nahuel, en classe de 3e au collège Dominique Savio de Lambersart est touché par la visite de la Kazern Dossin. Ce lieu de transit et de rassemblement situé entre Anvers et Bruxelles, a vu passer plus de 25 500 déportés. Dernière étape du voyage de mémoire, la Kazern Dossin devenue aujourd'hui un Mémorial, expose des photos, des dessins, des témoignages… C’est très fort en émotion. On voit la vraie vérité, ce qui s’est passé réellement et cela permet de ne pas oublier.

Et Claudie sa camarade de conclure : C’est important pour notre génération de se souvenir des évènements passés pour éviter qu’ils ne se reproduisent à l’avenir.

Un dispositif à pérenniser

Mené en association avec l'Éducation Nationale et le Mémorial de la Shoah, le dispositif "Le Nord, terre de mémoire vivante" vise à sensibiliser les élèves par des ateliers, des temps de travail et des voyages d'étude à la lutte contre toutes les formes de racisme et de discrimination. Avec une ambition : leur donner des clés de compréhension de l'Histoire pour honorer la mémoire des victimes et prévenir la répétition des erreurs du passé. 
La reconduction de ce dispositif pour 2024-2025 sera proposée à la prochaine séance plénière pour offrir la chance à d'autres élèves nordistes de participer à ces parcours mémoriels.

Crédits photo : Perrine Delporte, Philippe Houzé

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