Culture | Valenciennois, Douaisis
23 septembre 2022
À Bruille-Saint-Amand, Émilie Picavet rend palpable l'invisible
Pour cette artiste plasticienne, créer a toujours été une évidence. Sa passion s'exprime de multiples manières pour traiter des sujets forts. Rencontre avec une femme engagée.
Émilie Picavet nous accueille chez elle, à Bruille Saint-Amand, dans son petit atelier de 9 m². Un lieu qui va bientôt s’agrandir grâce à l’allocation d’installation d’atelier d’artiste obtenue de la DRAC. Le compagnon de l'artiste a donc entamé les travaux de restauration de leur ancien garage pour en faire un nouvel atelier de 30 m². Il faut dire que quand elle est dans sa bulle
, la plasticienne ne compte pas ses heures.
Aux murs sont accrochées des photos qui inspirent les créations d'Émilie. Sur son bureau, des os de seiches sont alignés les uns à côté des autres. L’artiste a cette particularité, elle détourne régulièrement des objets du quotidien pour en faire des œuvres d’art.
Cette fois-ci, elle est partie d’un souvenir d'enfance : Je ramassais très régulièrement des os de seiches avec ma mère lorsque j’étais enfant. Cet été, en les voyant par centaines sur la plage, je m’en suis souvenue et l’idée m’est venue spontanément de les graver pour en faire une représentation d’organes génitaux féminins. Je me questionne sur la condition féminine, et la femme en tant que telle m’inspire beaucoup
.
En témoigne aussi une œuvre en cours qui trône au milieu de la pièce. Il s’agit d’un tamis industriel qu’Émilie Picavet a sérigraphié et brodé pour en faire… un mamelon. À travers cette œuvre, l'artiste souhaite faire transparaître tout ce qu’un sein féminin peut représenter : la douleur d’une maladie, l’allaitement ou la féminité.
Montrer l'invisible
La plasticienne pratique le dessin, la gravure et la sérigraphie. Elle aime faire des mouvements répétitifs : passer et repasser sur les traits la transporte dans une sorte de méditation
. Elle crée aussi des installations. Les sujets qui l’animent ? Les femmes, le souvenir, les sentiments ou la maladie. Elle aime rendre visible ce qui, dans la vie, ne l’est pas forcément.
Je mets toujours le doigt sur ce qui fait de nous ce que nous sommes aujourd'hui.
Et sa façon de faire a su attirer l’attention de son public, l’émouvoir et faire écho à son histoire. Elle raconte : J’ai réalisé une sérigraphie représentant un pansement couvrant des coutures qui rappelaient des cicatrices. Lors d’une exposition, une dame a été bouleversée par cette œuvre. Elle voyait sa douleur à travers le pansement. Finalement, elle n’a pas pu repartir sans l’acheter
.
Lorsque de tels évènements adviennent, Émilie Picavet se dit qu’elle a tout gagné. Ce qui compte pour elle, c'est de transmettre de l’émotion
à travers son art. Elle aime particulièrement échanger avec son public, découvrir l’interprétation qu’il fait de ses œuvres, répondre aux interrogations et recevoir des critiques constructives.
De beaux projets à venir
L’artiste est aussi professeure d’arts au sein de l’association culturelle Tous Azimuts à Mortagne-du-Nord. Avide de moment de partage, elle souhaiterait avoir plus de temps pour multiplier les expositions autour de ses propres créations. En attendant, elle se réjouit d'accueillir le public chez elle lors des Portes ouvertes des ateliers d'artistes, et d’exposer ses œuvres à Trith-Saint-Léger en février 2023.
Mais surtout, Émilie aimerait s'essayer à la performance artistique en direct. Créer en live, c'est impressionnant. Quelque part, on se met en danger. Si je le faisais, je porterais une grande robe rouge, très lourde, pour symboliser que nous, femmes, portons beaucoup de choses sur nos épaules… Peut-être un jour ?
Infos pratiques
Emilie Picavet vous ouvre les portes de son atelier les samedi 8 et dimanche 9 octobre 2022. De 10h à 12h, et de 14h à 18h. Si vous souhaitez fêter avec elle l'inauguration de son nouvel espace de création, rendez-vous samedi à 18h !
Une seule adresse : 375 rue de la brasserie à Bruille-Saint-Amand. Retrouvez toute la programmation des Portes ouvertes des ateliers d'artistes sur poaa.lenord.fr
Crédits photo : Département du Nord/D. Lampla