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9 octobre 2024

Annie Brousse, une bonne fée pour les femmes atteintes du cancer du sein

Annie Brousse a connu le cancer du sein avant l'âge de 40 ans. Dès qu'elle a pu, elle a souhaité soutenir les femmes qui font face à leur tour à cette maladie. Avec beaucoup de sagesse, elle nous a reçus au Centre Oscar Lambret, pour nous parler de son parcours et de son association Vivre Comme Avant.

Quand on lui demande de parler de son propre combat contre le cancer, elle nous arrête tout de suite et précise gentiment : Ce n'est pas un combat, on n'est pas en guerre ! Quand on a un cancer du sein, on ne se sent pas malade ; quand tombe le diagnostic, la plupart du temps, on est en pleine forme. On ne peut pas lutter contre un mal que l'on ne voit pas, que l'on ne connaît pas. On se soigne, et c'est déjà beaucoup. Le cadre est posé, Annie Brousse sait de quoi elle parle.

Être soutenue dans la maladie

À l'âge de 38 ans, elle sent une petite boule dans le sein gauche, sous la douche : Je savais que j'étais à risque, ma maman avait eu un cancer du sein elle aussi. J'étais en panique, mais j'ai appelé mon gynécologue. J'ai expliqué mon cas et il m'a reçue en urgence.

À partir de là, tous les examens s'enchaînent, mammographie, échographie, biopsie… Des semaines d'attente qui semblent interminables. Cette période est celle de l'angoisse maximale. On le garde pour soi, mais on a bien en tête que c'est grave, ajoute-t-elle.

Les résultats confirment le diagnostic, une tumorectomie et 30 séances de radiothérapie viennent à bout de cette tumeur.

Dans les dix années qui suivront, Annie Brousse connaîtra deux récidives, sur les deux seins : Il y a le temps pour les traitements, mais il y a aussi le temps psychologique, qui est très long. On a peur à chaque examen, on est fatiguée, irritable, on ne sait pas comment en parler aux enfants, à la famille… Il faut trouver des stratégies pour réduire l'anxiété, relâcher le stress accumulé. La santé mentale est très importante pour la guérison, explique-t-elle.

Lorsque j'ai été opérée d'une mastectomie, assez traumatisante il faut le dire, j'ai eu la visite d'une bénévole dans ma chambre d'hôpital. Comme moi elle avait vécu le cancer du sein, et elle a eu les mots que je voulais entendre.

Cette bénévole faisait partie de l'association Vivre comme avant. Par son attitude bienveillante, sans apitoiement, elle m'a montré que moi aussi je pouvais m'en sortir

Et soutenir à son tour

Les années suivantes sont celles de la guérison : J'ai vécu plus de 10 ans avec le cancer, j'avais besoin de temps pour reprendre confiance en moi, reprendre mon travail, m'occuper de mes enfants et de mon couple… de souffler, tout simplement ! Mon engagement est arrivé plus tard, lorsque j'ai pu avoir plus de temps pour les autres, explique-t-elle. C'est donc à la retraite qu'elle entre dans l'association Vivre comme avant.

Je connaissais bien les problématiques liées au cancer du sein. J'avais aidé plusieurs femmes autour de moi, et l'une d'elles m'a dit un jour : "Tu as une énergie incroyable quand tu en parles, tu devrais en faire quelque chose !" J'ai proposé ma candidature à l'association et j'ai été retenue, se souvient Annie Brousse.

Un mot sur l'association...

Vivre Comme Avant est une association qui a pour mission de soutenir les femmes atteintes d'un cancer du sein. L'association est née aux Etats-Unis en 1952, puis s'est établie en Europe il y a près de 50 ans. Toutes les bénévoles ont vécu la maladie et sont formées pour accompagner les femmes en cours de traitement. Elles leur apportent un soutien émotionnel et individuel, à tout moment de leur parcours de soins. 

Lorsque la responsable de l'antenne de Lille quitte ses fonctions, Annie Brousse la remplace et devient secrétaire générale puis présidente de Vivre Comme Avant. Aujourd'hui, elle est toujours référente de l'antenne régionale, et avec les 7 autres bénévoles, poursuit ses visites au Centre Oscar-Lambret et à l'hôpital privé Le Bois.

Près de 400 femmes sont en contact avec elles chaque année. Depuis le COVID, nous avons réussi à mettre en place des appels téléphoniques, certaines patientes préfèrent nous contacter par ce biais. Quoiqu'il en soit, notre rôle reste ponctuel, nous ne sommes pas là pour remplacer l'équipe médicale ou les psychologues, nous sommes là pour montrer aux patientes que, oui, on peut s'en sortir, et vivre comme avant, précise la bénévole.  

L'association a d'ailleurs une sorte de code d'honneur. Pour intégrer l'association, il faut avoir fini les traitements depuis au moins deux ans, et surtout avoir tourné la page de la colère et des émotions : les bénévoles doivent aussi se protéger et ne pas se mettre en danger, ces rencontres charrient des souvenirs parfois douloureux, alors il faut être en paix avec soi-même, explique Annie Brousse.

Nous ne sommes pas là pour raconter notre histoire, mais bien pour écouter et rassurer les femmes, en respectant leur intimité. Nous leur donnons de l'espoir, des conseils pratiques si besoin, nous les réconfortons et les encourageons. Mais nous ne prenons pas partie, pour toute question médicale, nous invitons les patientes à questionner les médecins et les infirmières, cet équilibre est essentiel.   

Annie Brousse 

Enfin, comme les patientes se projettent souvent sur les bénévoles qui leur rendent visite, ces dernières font très attention à présenter une image positive d'elles-mêmes : On ne se présente pas malade ou blessée évidemment, et on veille à avoir une silhouette "normale" car très souvent, l'une des premières choses que regardent les femmes qui viennent d'être opérées, c'est notre poitrine. Elles cherchent à se rassurer en nous observant, explique la responsable.

La prévention, le maître-mot !

L'association Vivre Comme Avant a également créé un petit dépliant "Observer vos seins" avec la validation médicale du Dr Claudia Régis du Centre Oscar Lambret. Il permet de faire connaître aux femmes les signes visibles qui peuvent être associés au cancer du sein, et encourage l'autosurveillance au quotidien. Partout en France, il est distribué lors d'interventions en entreprises, auprès des étudiantes, et lors des campagnes de prévention Octobre rose.

J'encourage toutes les femmes à observer leurs seins, et à la moindre anomalie, à consulter un médecin rapidement. Et pour éloigner le cancer, il faut également adopter une bonne hygiène de vie, en mangeant sainement et en pratiquant de l'exercice physique, tout en évitant l'alcool et le tabac, rappelle Annie Brousse.

Plus le cancer est précoce, plus les chances de réussite des traitements sont grandes. Il faut absolument se faire dépister !

Un dépistage à réaliser de manière individuelle et ponctuelle, si besoin avant 50 ans, ou tous les deux ans, selon le dépistage organisé à partir de 50 ans, insiste-t-elle. Toutes les femmes ont droit gratuitement à une mammographie. Cet examen se fait sans anesthésie, sans préparation médicale, par des spécialistes dans des centres agréés. C'est une chance, il faut la saisir !

Crédits photo : I. Dalle

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