Séniors | Valenciennois
11 octobre 2022

À 85 ans, Roland Denaene est toujours derrière les ciseaux

Depuis 70 ans, il coupe, coiffe, embellit chaque personne qui s’assoit dans son salon de coiffure de Vieux-Condé. Roland Denaene est le coiffeur le plus âgé des Hauts-de-France. Et il est toujours aussi prisé.

Une élégance folle. Un sourire généreux. Des gestes précis. Roland Denaene est derrière le comptoir installé dans le couloir d’entrée de son salon de coiffure, qui est aussi sa maison. Marie-Françoise s’avance vers lui. C’est ici que je suis venue lorsqu’à 13 ans, j’ai décidé de couper mes longues nattes. Les décennies se sont envolées, mais pas ce lien entre eux. C'est un plaisir de venir et revenir. Son épouse, Esther, était d'un caractère très joyeux et Roland est un très bon coiffeur.  

Il est, par-dessus tout, un excellent coupeur.  Je ne travaille qu'avec des ciseaux japonais, confie Roland Denaene.  Ce sont les meilleurs. Les bons outils font les bons artisans. L'expérience aussi.

Le maître-coiffeur a commencé son apprentissage à 15 ans, dans ce même salon, au n°64 rue Édouard-Vermeesch à Vieux-Condé. C'était alors son grand-père, Alfred Roland, derrière les ciseaux. Il est devenu coiffeur en 1914, raconte Roland Denaene. Les gens du village venaient à vélo ou à pied se faire coiffer. Il fallait, jusqu'en 1955, chercher l'eau au puits installé sur la place de la cité des 3 arbres.

"Le dernier des Mohicans"

La rue n'était encore qu'une ruelle pleine de petits commerces. Une quincaillerie, une épicerie, une boulangerie, un rempailleur de chaises, un pressing, une poissonnerie, un café... Je suis le dernier des Mohicans, sourit Roland Denaene. 

Son grand-père cumulait deux emplois pour vivre. Il avait appris la coiffure, mais ce n'était pas rentable. Une fois les peignes rangés, il travaillait pour l'entreprise Dervaux (aujourd'hui Agratti) où l'on confectionnait des rivets pour la Tour Eiffel. Au salon, son épouse Clémentine aidait. Elle faisait la barbe des clients. On rasait beaucoup à cette époque-là.

La passion du cheveu bien coupé échappe au père de Roland Denaene, devenu chef de garde des Houillères, et lui manque de passer à côté également. Je ne savais pas quoi faire comme métier, se souvient-il. La mode m'a toujours plu alors j'ai finalement appris la coiffure à mon tour. 

Il obtient son brevet professionnel en 1958, son brevet de maîtrise en 1966 et le titre de maître-artisan, plus haute distinction dans l'artisanat. Les dix années suivant son apprentissage, il se perfectionne dans différents salons puis revient rue Édouard-Vermeersch avec son épouse, Esther. À lui la technique, à elle le sens du commerce. 

À la pointe de toutes les modes capillaires

Quand j'ai débuté, on utilisait beaucoup le rasoir. Les hommes voulaient des coiffures à la Georges Hardy puis il y a eu les années 70 et la mode des cheveux longs. C'était très dur pour les coiffeurs.

Roland Denaene s'adapte à tout. Même aux coupes actuelles à la tondeuse. J'ai une bonne technique. Les clients de tous âges défilent devant son bac à shampoing. Ça me ravit d'avoir des clients fidèles, mais aussi des nouveaux et des jeunes.

Depuis la Covid-19, il n'ouvre plus son salon le dimanche matin. Ça a été une période très dur pour notre profession, précise le maître-coiffeur. Mais du mardi au samedi, de 8h à 12h et de 13h30 à 18h, il est derrière le bac à shampoing. 

illustration 
Corinne et Roland Denaene, coiffeurs de père en fille.

Petite, je le voyais rentrer tous les soirs vers 22h, il travaillait tout le temps, se souvient Corinne, sa fille. Comme lui, elle est devenue coiffeuse et a fait son apprentissage avec lui. Il est exigeant, très précis, détaille-t-elle. Il excelle dans son travail et il est reconnu par ses clients pour ça.

Elle pensait un jour reprendre le salon fondé par ses grands-parents, mais Corinne Denaene sera bientôt à la retraite et son père n'est pas près de raccrocher les ciseaux.

Crédits photo : Département du Nord -C.Arnould

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