Culture | Flandre intérieure
5 novembre 2019

Ils sont venus écrire à la Villa Yourcenar

Nichée sur le Mont Noir, la villa Marguerite Yourcenar dans laquelle l'écrivain a passé une partie de son enfance accueille chaque année une quinzaine d'artistes. Rencontres.

Une résidence d’écriture est un moment privilégié dans la vie des auteurs. Et qui de mieux que les écrivains eux-mêmes pour nous en parler ? Nous sommes donc allés à la rencontre de ceux qui ont séjourné à la Villa au mois d'octobre.

" Se consacrer entièrement à l'écriture "

François-Henri Désérable a bénéficié de deux mois de résidence à la villa Marguerite Yourcenar, au mois d'août puis au mois d'octobre. Pour lui, " l'intérêt principal d'une résidence d'écrivains, c'est d'être isolé et coupé du social. "

De son séjour à Saint-Jans-Cappel, le jeune écrivain originaire d'Amiens retiendra " le cadre enchanteur et idyllique, ainsi que la bibliothèque bien fournie ". Il aimait se poster face au thuya géant de Californie planté il y a près de deux siècles dans le parc parce que " les vieux arbres donnent une certaine idée de l'éternité ". Un parc dans lequel il s'est promené chaque soir avant le coucher du soleil, comme quoi " on se recrée des routines même loin de chez soi..."

Au cours de sa résidence, François-Henri Désérable a notamment rencontré des collégiens latinistes. Lui qui pensait " ne rien avoir à leur dire " a été très impressionné par les moments partagés : " on a échangé, c'était enthousiasmant et tellement inattendu pour moi. C'est réjouissant de voir que des professeurs savent transmettre la curiosité à leurs élèves. Cela me donne foi en l'éducation ".

Et quand on lui demande de résumer son expérience à la Villa Marguerite Yourcenar, François-Henri Désérable cite Baudelaire : " Luxe, calme et volupté ".

" Un dispositif essentiel pour la création "

Avant de venir à Saint-Jans-Cappel, Ella Balaert avait déjà fait l'expérience d'une première résidence d'écrivains dans l'Oise. Ce dispositif qu'elle qualifie d'essentiel présente à ses yeux un double avantage : " lors d'une résidence, on se décharge l'esprit et on se nourrit des échanges avec les autres. "

Pourtant très habituée des rencontres avec les jeunes, elle raconte avoir vécu lors de sa résidence à la Villa Marguerite Yourcenar " des moments d'émotion extrêmement forts et infiniment précieux ", faisant notamment référence à ses échanges avec des collégiens d'Aubigny-au-Bac et de Nœux-les-Mines.

Elle a aussi beaucoup apprécié de retrouver un environnement forestier qui lui est familier, et en a profité pour marcher quotidiennement dans le parc. " La nature, c'est du vivant mais dans un autre rythme ; il s'en dégage quelque chose de spécial ".

Satisfaite du travail considérable accompli durant un mois, elle espère désormais " que le résultat sera à la hauteur...".

" Adapter librement son rythme " 

S'isoler pour travailler, avoir de nombreux moments de calme, ce sont - de l'aveu même de Thomas Coppey - des conditions de création inhabituelles pour un écrivain parisien.

" Une résidence, c'est idéal pour se plonger dans un travail " nous confie-t-il à l'issue de son séjour sur le Mont Noir. " On peut adapter son rythme comme on veut, jusqu'à se mettre à l'envers de l'organisation habituelle du temps : travailler la nuit et dormir le jour ". En un mois, il a pu terminer un manuscrit et en faire une relecture complète et continue, idéale " pour se rendre compte des variations de ton inhérentes à toute écriture faite par morceaux. "

À la Villa, l'écrivain s'est tout de suite senti " plongé dans le sillage des écrivains précédents, comme dans une lignée un peu vertigineuse ". Des temps forts, il en a vécu plusieurs, en particulier avec des collégiens d'un secteur plutôt défavorisé : " ce sont de vrais moments de découverte, une rencontre avec un monde qui n'est pas le mien. J'ai eu le sentiment d'apporter quelque chose et ça m'a apporté beaucoup aussi. "

Il repart avec dans sa valise trois mots tout simples pour qualifier sa résidence : " calme, tunnel et disponibilité d'esprit ".

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