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21 juin 2022
Concours d'écriture collégiens : découvrez les textes des lauréats 2022
Chaque année, la Villa départementale Marguerite Yourcenar propose aux collégiens nordistes un concours d'écriture. L'édition 2021-22 avait pour thème "Raconte moi ta cabane, je te dirai qui tu es". Voici les coups de cœur du jury.
Cette année 550 collégiens ont participé au concours d’écriture organisé par la Villa départementale Marguerite Yourcenar en partenariat avec la Délégation académique aux Arts et à la Culture de l'académie de Lille.
Un jury composé d'enseignants, d'auteurs et d'animateurs nature a sélectionné les meilleurs textes. Félicitations aux 20 lauréats ! Ils ont été invités, avec leur famille, pour une remise des prix dans le cadre magnifique du Parc départemental Marguerite Yourcenar, sur les pentes du Mont Noir.
Catégorie 6e/5e
Sujet proposé : "Tu te réveilles en pleine nature, dans un territoire inconnu. La nature s’anime et des créatures apparaissent pour t’aider dans la construction d’une cabane. Décris et raconte-la."
1er prix 6e : Ma cabane enchantée par Lina Kinziger (Collège Arthur Rimbaud, Villeneuve d’Ascq)
Je me suis réveillée dans une forêt où d’étranges créatures me dévisageaient. J’ai rapidement repris mes esprits et me suis mise debout. Il y avait des petits gnomes verts qui me tendaient une scie et, du bout de leurs petits doigts gluants, me montraient un arbre à deux mètres de là. J’en déduis alors que je devais le couper, je me suis donc exécutée. Je pris la scie, et dès que je l’ai mise au contact de l’arbre, elle est entrée dans une danse folle. Sans que je ne maîtrise rien, voilà que l’arbre tombe dans un fracas pas possible. Tous les petits gnomes allèrent le chercher pour me l’apporter. Ils me firent comprendre que je devais couper à nouveau et former un parfait pavé droit. J’ai fait de même avec tous les autres côtés du tronc. Mon travail achevé, une créature jaune et violette me fit un signe de tête pour que je la suive. Elle m’amena dans une grande clairière fleurie et un gnome semblait marmonner quelques paroles inintelligibles. Mais je compris que c’est ici que j’allais m’installer. L’endroit était magnifique, les oiseaux chantaient, les fleurs semblaient se donner la main en dégageant un doux parfum, le vent caressait ma joue et les rayons du soleil nous éblouissaient. Ni une ni deux, tous les animaux de la forêt formèrent une grande chaîne pour apporter les lattes de bois jusqu’à la clairière. Je profitais donc pour me reposer un peu.
A mon réveil, plus je m’approchai, plus les battements de mon cœur s’accélérèrent. Arrivée en face de la cabane, j’avais littéralement le souffle coupé. Ma cabane semblait en lévitation au-dessus d’un petit potager. Je décidais donc d’entrer, l’intérieur était tout aussi incroyable. Le salon disposait d’un canapé bleu paon qui épousait la forme de mon corps quand je m’y plongeai dedans. Dans la cuisine, une ribambelle de légumes se préparait à plonger dans la marmite. Dans ma chambre, il y avait un hamac accroché aux troncs qui me berçait au chant des oiseaux. Dans la petite bibliothèque, les romans semblaient se chamailler leur place. Je ne résiste pas à l’envie d’en saisir un. Lorsque je me mis à le lire, les pages se tournaient toutes seules. L’histoire parlait d’un monde où les gens ne se parlent pas, ne respectent pas la nature, les animaux et vont même jusqu’à s’entretuer pour défendre je ne sais quoi. Je referme alors le livre et je me mis à songer que j’avais de la chance d’être ici, au calme, au plus proche de la nature, centrée sur l’essentiel, dans ma cabane enchantée.
1er prix 5e : Adélie Duval (Collège Wenceslas Cobergher, Bergues)
Un beau matin, à l’aube, je me réveille au pied d’un lac. Quel paysage magnifique ! Je suis en extase !
Je décide alors de visiter la forêt de mélèzes aux alentours. L’odeur m’attire, je m’enfonce, joyeuse, vers le sous-bois. Mais, à ma grande surprise, les fleurs sont fanées, les branches des arbres sont cassées, le ciel est gris. Cette forêt est tellement triste ! Je me demande si elle n’est pas maudite. Je continue à progresser dans cette végétation digne d’un film d’horreur avec une peur grandissante. Cet endroit est de plus en plus froid. Un orage menace d’éclater. Il commence à pleuvoir quelques petites gouttes. Je suis terrifiée et j’ai froid je ne suis couverte que d’un tee-shirt et d’un short de randonnée. Je n’ai pas d’endroit pour m’abriter.
Il faut que je construise absolument une cabane mais comment ? Les branches cassées pourraient faire l’affaire mais elles sont si lourdes, et avec quoi les attacher ? Même si j’ai toujours aimé jouer aux aventurières dans mon jardin, ici, c’est différent. Je pleure alors de désespoir, seule, sans solution. Tout à coup, je sens quelque chose m’effleurer. Je me retourne vivement et regarde autour de moi mais je ne vois rien de particulier, juste une trace marron sur mon épaule. J’hurle : « Qui êtes-vous ? Au secours ! ». Je n’ai pas envie de mourir dans cet endroit terrifiant !
C’est alors que je vois des particules de terre quitter le sol dans un tourbillon. Elles se mettent à flotter, puis se rassemblent, jusqu’à former un monstre titanesque doté de longues mains boueuses. Waouh ! C’est à la fois magique et terrifiant. Les branches se mettent en mouvement, de grands bras marrons assemblent les pièces de ma cabane, les nouent avec des lianes. D’autres mottes de terre, tels des petits soldats, suivent l’exemple et soulèvent les feuilles mortes pour les assembler et former un toit. Le chantier est mené par … des ouvriers en terre ! Je n’ai que le temps de m’abriter en dessous de cet abri que l’orage éclate, balayant mes bienfaiteurs en une flaque de boue. Je ferme les yeux, de soulagement, attendant que l’orage s’éloigne. C’est alors que je sens des gouttes chaudes sur mon visage : c’est … mon chien qui me lèche le visage ! Maïko est à mes côtés, impatient de continuer la randonnée. Je crois que je me suis endormie au soleil !
Catégorie 4e/3e
Sujet proposé : "Tu as quitté la ville où tu habites pour trouver refuge dans une cabane qui te ressemble. Explique les raisons qui t’ont poussé à vivre, coupé du monde."
1er prix 4e : Jeanne More (Collège Franklin, Lille)
J'avais amassé un tas de choses, comme des branchages, d'anciennes ramures d'arbres, de la mousse et des feuilles mortes. J'avais fait comme font tous les oiseaux à la venue du printemps. Mon nid se trouvait quelques mètres au-dessus du sol, suspendu dans les branches d'un chêne. Il n'y avait rien d'incroyable là-dedans, je n'y faisais que dormir. J'avais caché dans un trou qu'avait dû occuper un pic-vert un cahier de dessin dans lequel j'illustrais mon ancienne vie. J'avais été élevée dans la ville voisine. Petite, je courais dans les rues comme le faisaient les daims dans les prairies verdoyantes. J'avais écouté le chaos urbain à ma fenêtre, le fracas d'une ville éveillée. J'avais cru trouver en ce monde la nature que les livres et les films vantaient, comme un luxe qu'on ne pouvait s'accorder que le week-end.
Mais ici, maintenant, tout était différent. Mille regards habitaient les sous-bois, mille façons de voir le monde. L'homme n'avait plus d'échelle, plus de repères, car ce n'était pas son royaume, ça ne l'avait jamais été. Il ne pouvait pas s'attribuer l'arbre et ne pouvait pas s'approprier la bête ; c'était de braves guerriers qui préféraient mourir dignement plutôt que de se rendre. C'étaient des soldats qui surgissaient de la terre et vouaient une guerre sans fin à la ville qui s'écoulait jusqu'ici.
Ici je vivais pleinement, je n'étais plus réduite à une condition humaine, j'étais aussi merle, couleuvre, renard, escargot et blaireau. Je n'étais nulle part en eux et je ne pouvais l'être, il était trop tard pour ça. C'est eux qui étaient en moi. Le soir, lorsque je m'élevais dans le chêne, lorsque je me glissais dans les branchages pour m'endormir, je pouvais voir au loin la ville fulminante. Je me rappelais alors ce qui m'avait décidée à partir. Tout avait commencé trois ans plus tôt. Une prise de conscience écologique assaillait alors la ville. Tous les adultes se questionnaient de parts et d'autres, se déchiraient l'esprit jusqu'à abandonner leurs plus sûres certitudes. Nous, êtres humains, étions comme pris d'assaut par notre propre reflet. Tout nous révulsait alors ; la grande consommation, en passant par l'alimentation, les vêtements et le plastique, du jetable, du non-durable, de l'instantané. Les animaux victimes de notre bêtise s'échouaient jusqu'à notre région, ravivant une douleur insupportable parce que totalement méritée. Nous, adultes de la ville, avons alors décidé de partir. Nous avons laissé enfants et maisons pour fuir notre défaite. Nous avons emprunté des directions différentes, dans la forêt, et nous sommes terrés là où nous pouvions. Nos enfants, demeurés en ville, seraient les descendants d'une nation désenchantée, abominables chimères humaines et animales. Ils se débrouilleraient seuls, et répareraient nos erreurs. Nous en étions persuadés.
Seulement, voilà, je n'ai pas croisé âme qui vive depuis trois hivers.
1er prix 3e : Ma cabane en l'air, mon refuge par Lisa Gesbert (Collège Charles Eisen, Valenciennes)
Maudits soient la pollution et le tumulte de la ville, la violence quotidienne et la société actuelle
Axée sur l’égoïsme, le paraître, l’argent, les loisirs, la consommation et le virtuel !
Cherchant à faire une pause dans ce monde de fous, afin de ne pas sombrer dans la dépression,
A l’écart de tout j’ai décidé de vivre et, en hauteur dans les arbres, je t’ai bâtie à la sueur de mon front.
Bien m’en a pris ! Véritable havre de paix où air pur, silence et Dame Nature ont fait leur œuvre.
Apaisée et ragaillardie, auprès de toi j’ai trouvé le sens à donner à ma vie :
Ne jamais oublier d’où l’on vient pour savoir où aller. Désormais je vis,
En compagnie des oiseaux, écureuils et chauves-souris et avec un hamac suspendu en guise de lit ;
Et la terre de mes ancêtres me nourrit et me berce de sa douce mélodie.
Nul besoin de plus pour être heureuse aujourd’hui.
L’homme, éternel insatisfait dans sa quête de bonheur,
A perdu l’essentiel. Mais quand réalisera- t-il son erreur ?
Impossible pour moi d’imaginer te quitter,
Refuge d’un être en errance qui ne se reconnaît plus dans la société.
Même mes amis m’avaient tourné le dos et mis au rebut
Oubliant volontiers les nombreux services que je leur avais rendus
N’accordant d’importance qu’à leur image, leur portable et leur argent.
Résolue dans mon projet et prête à aller de l’avant,
En traçant un trait définitif sur mon passé pour mieux construire mon futur,
Finalement, un jour, j’ai tout plaqué.
Ultime décision à prendre pour survivre ici,
Gageant que je n’avais rien à perdre, mais tout à gagner.
Et ainsi je me suis ressourcée et réconciliée avec la vraie vie. Un seul mot à toi : merci !
Crédits photo : Ph. Houzé