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29 avril 2024
1er mai 1891 : bain de sang à Fourmies
Ce 1er mai 1891, le monde ouvrier manifeste pour réclamer de meilleures conditions de travail. A Fourmies, la fête bon enfant, tourne au drame.
Cité ouvrière de 16 000 habitants
irriguée par l'industrie textile, Fourmies, dans l'Avesnois, est en
fête ce 1er mai 1891.
Grèves, manifestations, pique-niques
et bals dansés, sont au programme du jour. Un programme qui rassure
le préfet, lequel prédit le 26 avril qu'il n'y a aucun danger en
perspective, la Gendarmerie suffira à assurer l'ordre.
Les ouvriers réclament la journée de 8 heures, la création d'une bourse du travail, l'amélioration des conditions d'hygiène, ainsi que la création de caisses de retraite.
De nombreuses victimes
Le jour J, le soleil brille sur Fourmies. Dès 9 h, plusieurs manifestants tentent de rallier à leur cause la seule filature où le travail n'a pas cessé. Il s'ensuit des échauffourées avec les gendarmes.
Quatre ouvriers sont arrêtés et coffrés en mairie. La foule accourt pour réclamer leur libération.
Deux compagnies d'infanterie du 145e de ligne de Maubeuge investissent la ville et le calme revient. La suite de la journée se passe sans anicroche, entre repas de famille, théâtre et bonne humeur.

Mais à 18 h 45, alors qu'environ 200 manifestants se rassemblent sur la place de l'église, pour réclamer de nouveau la libération des quatre détenus, tout dérape en un éclair.
Des cailloux volent en direction des 300 soldats chargés du maintien de l'ordre. La foule se presse. Le commandant Chapus ordonne à ses hommes de tirer en l'air. Les manifestants restent stoïques. Alors, les soldats ouvrent le feu. On relève 10 victimes touchées à bout portant, comme Maria Blondeau 18 ans, Kéber Giloteaux, 19 ans ou Emile Cornaille, 11 ans.
Une trentaine d'autres civils ont été blessés au cours de la fusillade.
Funèbre inauguration
Ironie, les militaires venaient de
percevoir le tout nouveau fusil Lebel, calibre 8 mm. A Fourmies, c'est
sur une gamine que le Lebel fit son premier essai
, écrira le chansonnier
Montéhus.
Le 4 mai 1891 ont lieu les funérailles des victimes en présence de plus de 30 000 personnes. Culine et Lafargue, les meneurs du Parti Ouvrier Français, sont eux arrêtés et condamnés pour provocation directe au meurtre, à respectivement six et un an de prison.
Après cette tragédie, Georges
Clémenceau alerte ses collègues députés sur l'importance de ce
qu'il s'est passé à Fourmies. Il éclate aux yeux des moins
clairvoyants que partout, le monde des travailleurs est en émoi, que
quelque chose de nouveau vient de surgir (…). Il y a quelque part
sur le pavé de Fourmies, une tache innocente qu'il faut laver à
tout prix.
En 1903, un monument commémoratif sera élevé au cimetière de Fourmies, en l'honneur des fusillés.