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1 mai 2021

1er mai 1891 : bain de sang à Fourmies

Ce 1er mai 1891, le monde ouvrier manifeste pour réclamer de meilleures conditions de travail. A Fourmies, la fête bon enfant, tourne au drame.

Cité ouvrière de 16 000 habitants irriguée par l'industrie textile, Fourmies, dans l'Avesnois, est en fête ce 1er mai 1891.

Grèves, manifestations, pique-niques et bals dansés, sont au programme du jour. Un programme qui rassure le préfet, lequel prédit le 26 avril qu'il n'y a aucun danger en perspective, la Gendarmerie suffira à assurer l'ordre.

Les ouvriers réclament la journée de 8 heures, la création d'une bourse du travail, l'amélioration des conditions d'hygiène, ainsi que la création de caisses de retraite.

De nombreuses victimes

Le jour J, le soleil brille sur Fourmies. Dès 9 h, plusieurs manifestants tentent de rallier à leur cause la seule filature où le travail n'a pas cessé. Il s'ensuit des échauffourées avec les gendarmes.

Quatre ouvriers sont arrêtés et coffrés en mairie. La foule accourt pour réclamer leur libération.

Deux compagnies d'infanterie du 145e de ligne de Maubeuge investissent la ville et le calme revient. La suite de la journée se passe sans anicroche, entre repas de famille, théâtre et bonne humeur.

Image d'archive

Mais à 18 h 45, alors qu'environ 200 manifestants se rassemblent sur la place de l'église, pour réclamer de nouveau la libération des quatre détenus, tout dérape en un éclair.

Des cailloux volent en direction des 300 soldats chargés du maintien de l'ordre. La foule se presse. Le commandant Chapus ordonne à ses hommes de tirer en l'air. Les manifestants restent stoïques. Alors, les soldats ouvrent le feu. On relève 10 victimes touchées à bout portant, comme Maria Blondeau 18 ans, Kéber Giloteaux, 19 ans ou Emile Cornaille, 11 ans.

Une trentaine d'autres civils ont été blessés au cours de la fusillade.

Funèbre inauguration

Ironie, les militaires venaient de percevoir le tout nouveau fusil Lebel, calibre 8 mm. A Fourmies, c'est sur une gamine que le Lebel fit son premier essai, écrira le chansonnier Montéhus.

Le 4 mai 1891 ont lieu les funérailles des victimes en présence de plus de 30 000 personnes. Culine et Lafargue, les meneurs du Parti Ouvrier Français, sont eux arrêtés et condamnés pour provocation directe au meurtre, à respectivement six et un an de prison.

Après cette tragédie, Georges Clémenceau alerte ses collègues députés sur l'importance de ce qu'il s'est passé à Fourmies. Il éclate aux yeux des moins clairvoyants que partout, le monde des travailleurs est en émoi, que quelque chose de nouveau vient de surgir (…). Il y a quelque part sur le pavé de Fourmies, une tache innocente qu'il faut laver à tout prix.

En 1903, un monument commémoratif sera élevé au cimetière de Fourmies, en l'honneur des fusillés.

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