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17 août 2023

Pas besoin d'écrans pour devenir grand

Entre l’ordinateur, la télévision, la tablette ou le téléphone, nous avons souvent plein d’écrans à la maison. Quelle place leur accorder ? Comment s'organiser ? Toute la famille est-elle concernée ? Mélanie Ducrocq, infirmière à la Protection Maternelle et Infantile, nous donne quelques conseils.

Pour quelles raisons est-il important de s'interroger sur la place des écrans ?

Mélanie Ducrocq : Les images qui défilent, les sons, les couleurs vives... Tout cela est très attirant pour l'enfant, mais ça l'empêche de bien se développer !

Pour grandir, les tout-petits ont besoin de bouger, de manipuler des objets, de communiquer avec des adultes disponibles pour eux. En captant fortement leur attention, les écrans les privent des interactions humaines et de la découverte sensorielle du monde, indispensable au développement de leur cerveau. 

Aujourd'hui, les professionnels de la petite enfance sont unanimes : une surexposition aux écrans entraîne des difficultés diverses : retards de langage, agitation, problèmes de concentration, maladresses, difficultés de communication, pouvant être à tort confondues avec les troubles du spectre autistique. Maîtriser sa consommation d'écrans est un véritable enjeu de santé publique, et c'est encore plus le cas dans les Hauts-de-France, où le temps d'usage des écrans pour les enfants de 2 à 5 ans est le plus élevé de France.

Pourtant il existe de nombreux jeux et programmes sur écran conçus pour les bébés...

Mélanie Ducrocq : En effet, il existe de nombreux produits numériques destinés aux tout-petits : chaînes de télé dédiées, jeux et tablettes interactives... Ces objets sont très captivants pour bébé et aussi pour les parents, qui voient l'enfant apprendre des comptines en plusieurs langues, les chiffres, les lettres... Pourtant, ce n'est pas parce qu'un enfant sait compter jusque 100 qu'il comprend ce que cela signifie !

Lors des bilans de 2 ans réalisés en PMI ou de 4 ans réalisés en maternelle, nous rencontrons des enfants qui désignent une couleur en anglais, mais ne savent pas la dire en français... Les meilleurs jouets sont ceux qui aident les parents et les enfants à jouer, à faire semblant et à interagir. Chaque enfant grandit à son rythme et progresse en étant écouté, regardé, encouragé. N'oubliez pas : la meilleure application pour votre enfant, c'est vous !

Quelles règles simples peut-on mettre en place ?

Aucun jouet ou livre, même surconsommé, ne pose difficulté. Les écrans en revanche demandent de mettre en place ce qu'on pourrait appeler une hygiène de vie numérique, qui concerne l'enfant mais aussi tout son entourage.  

Pour toutes les raisons évoquées, il est recommandé d'éviter les écrans avant l'âge de trois ans, même la télévision "ambiance". 

Parfois, quand on est occupé ou fatigué, on peut être tenté de laisser bébé seul devant la télé, la tablette ou un téléphone. C’est normal, on a aussi besoin de temps pour nous ! Dans ces cas-là, l’écran n’est pas la seule solution. On peut installer bébé dans un espace sécurisé sur lequel on peut garder un œil : un parc, un lit, une poussette, une grande couverture par terre, avec des livres, des jouets et son doudou.

Pour les plus de 3 ans, le temps d'écran doit être limité et maîtrisé. Il y a un repère simple à retenir : celui des 4 pas, théorisé par Sabine Duflo

  • pas d'écran le matin, afin de permettre à l'enfant d'être attentif en classe
  • pas d'écran pendant les repas : parlez avec votre enfant, sans être distrait par la télévision ou votre téléphone. 
  • pas d'écran avant de se coucher : la lumière bleue des écrans empêche la sécrétion de la mélatonine et retarde l'entrée naturelle dans le sommeil. Préférez un moment calme, lisez une histoire avec votre enfant, discutez, cela le sécurise.
  • pas d'écran dans la chambre : l'enfant peut alors imaginer, créer, inventer et apprendre à être seul sans angoisser.

Dans tous les cas, on garde le contrôle sur le contenu, en choisissant un programme adapté, par exemple un dessin animé lent avec des couleurs douces, et on accompagne l'enfant. Quand il est devant un écran, quel qu’il soit, même si on a l’impression qu’il ne le regarde pas, il a besoin d’un adulte à ses côtés pour lui expliquer ce qui se passe et réagir à ses émotions.

Un autre repère facile à retenir est la règle du 3/6/9/12 du psychiatre Serge Tisseron : pas d'écran avant 3 ans, éviter la console de jeux avant 6 ans (privilégier les jeux à plusieurs), pas d’Internet avant 9 ans, et Internet accompagné jusqu’à l’entrée en collège, Internet seul à partir de 12 ans, avec prudence et sous contrôle parental. 

Enfin, si on constate un changement dans le comportement, des troubles dans l'attention, les apprentissages, il ne faut pas hésiter à demander de l'aide. Les professionnels de la PMI sont là pour vous accompagner !

Accompagnement par la Protection Maternelle et Infantile

Promotion de la santé et prévention des addictions : Pensez aussi Epicéa ! Situé au 1er étage du 24 boulevard Carnot à Lille, le centre de ressources d'Epicéa, ouvert à tous, propose à l'emprunt une large sélection de documents dédiés à la promotion de la santé au sens large, dont la sensibilisation aux écrans. 

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Bibliographie proposée par la médiathèque départementale du Nord : Les écrans, anges ou démons ? Romuald Ollivier et Olivier Roubin ; 3-6-9-12 apprivoiser les écrans et grandir, Serge Tisseron ; Réduire les écrans, 10 jours pour tout changer, Élisabeth Baton-Hervé ; La famille tout-écran, guide du Centre pour l'Éducation aux Médias et à l'Information (CLEMI) ; Les tout-petits face aux écrans, comment les protéger, Docteur Anne-Lise Ducanda. 

Crédits photo : istock

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