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6 mai 2020

8 mai 1945 : un Nord exsangue célèbre la victoire

Libéré en presque totalité fin 1944, le Nord, à l'unisson du pays, célèbrait il y a 75 ans la victoire des Alliés sur l'Allemagne nazie. Une fête assombrie par le terrible bilan des années de guerre.

Il y a foule aux balcons et la grand place de Lille est noire de monde. Ce 8 mai 1945, c'est le soulagement tant attendu, c'est la fête. L'Allemagne a enfin capitulé ! Victoire !

Au fronton de la façade de l'actuel siège de la Voix du Nord, une banderole a été déployée : Liberté.

Bien sûr, l'enthousiasme de la population est tout de même moindre que la liesse qui s'est emparée de chaque ville à leur libération,

Ce 8 mai est néanmoins célébré par de nombreux discours de personnalités, des défilés et des concerts de cloches.

Un bilan effroyable

Mais l'heure est davantage au bilan de la guerre, et pour la région toute entière, celui-ci est effroyable. Comme en 1918, elle est la plus sinistrée de France. En témoignent ces quelques chiffres :

  • Le Nord et le Pas-de-Calais ont perdu à eux deux 116 000 habitants.
  • 134 000 bâtiments ont été détruits dans le Nord.
  • La région recense 27 % de la totalité des immeubles détruits en France.
  • Valenciennes, Douai, Maubeuge ont perdu leur centre historique.
Journal Nord-Eclair avec en Une une croix de Lorraine. <br>
Une de Nord-Eclair, le 5 septembre 1944 pour la libération du Nord.

Dunkerque, l'oubliée

Alors que toutes les villes du Nord célèbrent la victoire, les Dunkerquois sont, eux, privés de festivités.

Pour expliquer cette incongruité, il faut remonter à février 1944, quand Hitler ordonne que plusieurs villes du littoral deviennent de véritables forteresses devant tenir jusqu'au bout, coûte que coûte. Dunkerque est une de ces forteresses.

Une grande partie de sa population, les bouches inutiles, est évacuée par les Allemands, si bien qu'il n'y reste bientôt plus qu'environ 25 000 habitants.

Fonçant vers le Nord, le maréchal Montgomery décide en septembre 44 de libérer en priorité Anvers, qu'il veut utiliser comme plateforme logistique pour ses armées. Dunkerque est laissée à son sort.

L'armée allemande y compte alors 12 000 hommes en ville, dirigés par le vice-amiral Friedrich Frisius, qui compte bien aller au bout de sa mission : tenir. Et il va le faire.

Acculé, il signera finalement sa reddition à Wormhout, le 9 mai 1945, laissant derrière lui une ville en ruines.

Une fête triste

Pour le grand historien Yves Le Maner, en France, les esprits sont ailleurs, chagrins. Dans le Nord, la population est confrontée encore à la pénurie alimentaire récurrente, aux difficultés économiques, au chômage et au manque de logements, suite aux destructions massives.

La reconstruction prendra une dizaine d'années.

Une éclaircie cependant : ce 8 mai 1945 se situe entre les deux tours des élections municipales. Depuis le 21 avril 1944, les femmes ont le droit de voter. Elles se précipitent aux urnes. Mais cela est une autre histoire !

Crédits photo : La Voix du Nord, musée de la Résistance de Bondues. Sources : Le Nord - Pas-de-Calais dans la main allemande, Etienne Dejonghe et Yves Le Maner. Lavoix éditions

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